Quelles perspectives pour les industriels du Chauffage, climatisation et ventilation ?

À la faveur d’une augmentation des mises en construction en 2017, Uniclima montre des résultats de ventes très positifs. Sauf pour les gros systèmes destinés au tertiaire.

 Légende : Les membres des bureaux de l’association Pac&Clim Info, du Syndicat Uniclima, et, à gauche, Pierre-Louis François, Président du salon Interclima ©B. Reinteau

Avec un volume de mise en chantier de 427 800 logements en 2017, puis de 398 000 en 2018, la filière industrielle du génie climatique a surfé sur une vague haute. Les ventes d’équipements s’en sont pleinement ressenties.

En premier lieu les chaudières. Le marché des unités au gaz et au fioul s’est élevé de 4,8 %, avec un chiffre des ventes finales de 661 000 pièces. La famille des générateurs à condensation compte aujourd’hui pour près des trois quarts des ventes, avec 544 000 chaudières, en augmentation de 11 % par rapport à l’année 2017.

Les chaudières dites basse température, 117 000 pièces, continuent leur sortie du marché avec un rythme de baisse annuelle de 18 %. Uniclima note évidemment que l’interruption du crédit d’impôt sur les chaudières fioul à partir du 1er juillet dernier a eu un effet quasi immédiat sur ce marché.

Au seuil des 100 000 Pac

Le segment bénéficiaire est celui des pompes à chaleur, indique François Frisquet, président d’Uniclima. Les versions air/eau tangentent le seuil symbolique des 100 000 unités. 96 576, très exactement, soit une croissance annuelle de 16 % (à noter que le volume a doublé depuis 2012). Il s’agit essentiellement d’un marché d’unités bibloc (88 000 pièces), et les ventes de matériels de fortes puissances, de 10 à 20 kW, augmentent le plus fortement (+ 39 %). Signe de l’équipement de l’existant en lieu et place du fioul, ou en relève de chaudière.

Quant aux chaudières ou Pac hybrides – corps de chauffe gaz et pompe à chaleur sous la même jaquette –, il faut constater leur échec commercial : 2 800 ventes en 2018.

Par ailleurs, le marché plus haut de gamme de la géothermie, en dégringolade depuis plusieurs années (6 448 en 2012), se stabilise à 2 497 installations. Celui des chauffe-eau thermodynamiques (ou Pac ECS) a atteint le niveau de 103 879 et a connu une croissance annuelle de 18 % (il s’en vendait 34 900 en 2012).

Didier Metz, responsable de Mitsubishi Electric, Président de l’association Pac&Clim Info

Climatisation : le renouvellement des équipements de 2003-2004

Alors que le discours officiel sur la climatisation – ou pompes à chaleur air/air – est toujours « désaprobateur », ce marché subit un véritable emballement, commente Didier Metz, de Pac&Clim Info.

Déjà d’un niveau élevé depuis la fin des années 2000, il connaît, 15 ans après la canicule de 2003, les effets du renouvellement de l’existant. Ainsi, multis et monosplits ont enregistré un bond de 18 % : 571 140 unités (333 775 en 2012). Un chiffre supérieur à celui des chaudières à condensation ! Les ventes d’unités intérieures sont à l’avenant, avec une croissance globale de 20 %.

Eric Bataille, Directeur des Affaires publiques du groupe Atlantic, responsable du comité stratégique Ventilaton et Traitement d’Air des bâtiments d’Uniclima

Bois et solaire thermique à la traîne

Les marchés de produits plus « traditionnels » comme les chaudières biomasse et les capteurs solaires thermiques se révèlent léthargiques par rapport aux concurrents.

Les ventes de chaudières au bois restent stables à quelque 10 900 pièces, et les surfaces de capteurs thermiques stagnent elles aussi à 50 000 m², malgrè une stabilisation en collectif (+ 3 %). les ventes de chauffe-eau solaires individuels ont chuté pour la dixième année consécutive : -16 % et seulement 4 600 installations.

Ventilation : en logement, du basique !

Le marché de la ventilation a aussi tiré son épingle du jeu dans ce marché de la construction en croissance. 823 455 systèmes de ventilation ont été vendus en 2018.

Avec 802 445 pièces, les ventes de caissons simple flux augmentent de 3,7 % ; le double flux (21 010 installations) trouve de moins en moins à se placer (-7,1%). En collectif et tertiaire, le simple flux s’impose à 100 456 unités (+ 2,6 %) face au double flux à 12 549 systèmes (+ 5,8 %)

François Deroche, responsable marketing et commercial de Daikin France, Trésorier de l’Afpac

Tertiaire : la grosse puissance tire le marché

Le produit phare pour le confort en tertiaire est bel et bien le DRV. Mis sur la sellette il y a quelques années en raison de l’exploitation de gaz réfrigérants promis à une restriction d’usage, ce générateur à détente directe a, en cinq ans, hissé ses ventes de 15 000 unités annuelles (chiffre 2013) à aujourd’hui près de 26 000.

Une évolution qui tient à la fois à la souplesse d’usage de cette solution de chauffage et de rafraîchissement et à l’évolution récente de la réglementation incendie CH 35 relative aux établissements recevant du public : ce texte accepte les fluides frigorigènes sous réserve de précautions d’installations.

Par ailleurs, ce type de matériel mord d’une part sur le segment des gros splits de plus de 17,5 kW, qui stagnent à 3 670 pièces, et d’autre part sur celui des petits producteurs d’eau glacée (chillers). Ces derniers voient leurs ventes considérablement baisser : – 15 % pour les puissances de moins de 17,5 kW, – 29 % pour les 17,5 à 100 kW, -23 % pour les 100-200 kW.

François Frisquet, PDG de l’entreprise Frisquet, Président d’Uniclima

Moins de ventes des centrales de traitement d’air

Les industriels remarquent cependant une stagnation des ventes, voire une envolée sur les très grosses puissances : +35 % sur les + de 500 kW. Le phénomène est lié au développement des datacenters. Ce segment génère les plus importants chiffres d’affaires. Conclusion : si le marché des chillers baisse globalement de 16 % (5 229 unités en 2018), il augmente en valeur.

Autre marché très bousculé par la concurrence des systèmes : les centrales de traitement d’air. Il a atterri à 6 146 unités, soit -7 %. Cette baisse concerne les références de tailles intermédiaires, de 5 000 à 15 000 m3/h. Les clients optent, soit pour des versions à plus gros débit (plus de 15 000 m3/h), soit pour de la ventilation double flux classique. Le segment des CTA de 15 000-50 000 m3/h, qui rassemble seulement 718 ventes en 2018, est le seul à croître : +19 %.

Les enjeux d’une année charnière

Pour François Frisquet, l’année 2019 s’engage de manière très paradoxale. Alors que sont brandis les enjeux environnementaux, il dressait le constat, au 6 février, de l’absence de publication des arrêtés relatifs à la loi de finances votée fin décembre et de l’application des nouvelles modalités d’accès aux dispositifs financiers. L’annonce, le matin même, du rapport de la cour des Comptes sur les finances publiques, amplifiait dramatiquement l’incertitude.

Cette situation réglementaire s’ajoute au « coup de Jarnac » de la modification des modalités des aides financières à la rénovation le 22 décembre au soir, sans discussion avec la filière, puis au lancement des opérations « chaudière à 1 € ».

À noter que la prolongation d’un an de la dérogation de 15 % du niveau de consommation énergétique dans le collectif neuf soumis à la RT 2012 – soit 57,5 kWh/m².an au lieu de 50 –, paru au JO le 21 décembre, n’avait pas été annoncée aux professionnels ; cette mesure handicape essentiellement le solaire thermique.

Pierre-Louis François, Président du Conseil de surveillance de SEDECO (propriétaire d’Atlantic), Président du salon Interclima

Comment dynamiser le marché de la rénovation

Pour ce qui concerne ce sujet de la rénovation, Pierre-Louis François, président du salon Interclima et qui s’était rendu le 5 février à une réunion du syndicat européen de l’industrie du chauffage EHI, faisait remarquer que le niveau de 1 % du renouvellement des installations de chauffage constaté en France était pareillement relevé dans les autres pays européens.

« Le faire monter à 1,3 voire 1,5 %, ce serait bien », car pour tous les acteurs rencontrés, « dynamiser le marché du remplacement est difficile », estime-t-il. En clair, le forcer par des actions spectaculaires serait, au mieux inefficace, au pire contre-productif en raison du risque de contre-références.

2019 est une année Interclima (5-8 novembre), et, avec l’aide de Hugues Haentjens, journaliste précédemment responsable des titres l’Installateur puis CFP, Uniclima, propriétaire de l’événement, a rassemblé ses adhérents pour relancer le salon.

Les halls de Villepinte accueilleront un espace « innovations » de 400 m², un espace « Biomasse » de 500 m², un espace « métiers et recrutements », un espace « conférences »… Le faire-venir s’appuie sur la location de 50 bus qui conduiront les installateurs et distributeurs situés dans un rayon de 200 à 250 km autour de Paris, ainsi que sur l’organisation de trois TGV au départ de Bordeaux, Marseille et Lyon. Soit 4 000 visiteurs.


Source : batirama.com / Bernard Reinteau

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